Non, ce n’est pas breton, mais bien wolof : Kër se dit « cœur » et signifie « la maison » : « Car pour moi les femmes sont le cœur de la maison. Chez elles, ce sont de vraies cheffes d’entreprise. Elles y gèrent tout ! », explique Marie-Louise Faye, fondatrice de Kër qui a vu le jour en décembre 2020. L’association a été conventionnée structure d’insertion par l’activité économique, porteuse d’un atelier et chantier d’insertion qui emploie des femmes issues des migrations pour leur créer un tremplin.
Un parcours entre persévérance et ténacité
Ingénieure agroalimentaire, Marie-Louise commence son parcours en tant que salariée de chantiers d’insertion. Elle y a notamment la charge de mettre en place des bonnes pratiques (formations, HACCP, process de production, etc.). Elle suit en parallèle des cours du soir pour obtenir son diplôme d’accompagnement socioprofessionnel de publics en situation de difficulté et de précarité. Elle devient même chargée de mission sur le volet emploi et formation de la Fédération des acteurs de la solidarité en région Bourgogne-Franche Comté. « J’ai finalement travaillé sur toutes les phases en lien avec l’insertion par l’activité économique », résume-t-elle. Durant ce parcours, l’envie d’entreprendre et d’assumer pleinement son autonomie ne la quitte jamais. Elle se lance d’ailleurs dans deux projets de création d’entreprise qui n’aboutissent pas, faute de financements : « J’ai voulu me lancer dès la sortie de l’école, et je n’étais pas prête. Pour que ça se concrétise, j’ai eu besoin de me construire, de gagner en expérience et en réseau. Surtout, ça m’a appris la persévérance et à ne pas baisser les bras ! »
Redonner de l’autonomie aux femmes migrantes
En 2020, Marie-Louise sent donc que c’est le bon moment pour se lancer. Et même si elle attend son premier enfant au même moment, jamais sa motivation ne faiblit. Car la création de Kër est avant tout une histoire d’autonomie : celle de Marie-Louise bien sûr, mais aussi celle de ces femmes migrantes qu’elle emploie en contrats d’insertion. « Le déclic s’est fait quand j’ai rencontré à Paris l’association Food de rue. Je me suis alors dit que je devais transposer le concept à Dijon. J’avais mon projet d’entreprise et il m’est apparu évident qu’il ne fallait pas que je sois la seule à en bénéficier et qu’il fallait que je l’ouvre à d’autres femmes. Je viens du Sénégal et je connais la difficulté de pouvoir vivre sa vie en tant que femme, d’être discriminée en fonction de ses origines… »
Pour monter son projet, Marie-Louise est accompagnée par l’incubateur T, co-piloté par France Active Bourgogne. Elle mène ainsi une phase d’expérimentation de neuf mois. Dans ce cadre, elle bénéficie également d’un Fonds de confiance (devenu Place de l’Émergence). « Ces étapes ont été très structurantes. Elles ont permis de démontrer la pertinence du projet et, dès juillet 2021, j’ai obtenu l’agrément chantier d’insertion. En septembre, je recrutais les premières employées. » Elles sont désormais dix, toutes habitantes de l’agglomération Dijonnaise. Venant d’Algérie, du Maroc, de Mongolie, du Sri Lanka, d’Inde, d’Éthiopie ou du Congo, chacune propose à la carte des plats issus de leur pays d’origine. « Pour certaines, il s’agit de leur première expérience de travail. C’est très stimulant de les voir chaque jour gagner en confiance, prendre plaisir à sortir de chez elles, de leur isolement, de commencer à construire un parcours professionnel pour le futur. Il y a également une magnifique dynamique d’entraide et de solidarité qui se crée. »
Et alors que l’association est actuellement accueillie par le Centre d’hébergement et de réinsertion sociale ADEFO, Marie-Louise se lance un nouveau défi : trouver un local, voire l’acheter. « Nous pourrions ainsi rassembler nos bureaux, nos espaces de formation, nos lieux de production, mais aussi proposer des postes de travail et de formation plus confortables et accueillir des clients en vente directe. » De quoi continuer à donner la pleine mesure de ce projet.
A bénéficié
A été accompagné par
France Active Bourgogne