
Prêts entre associations et fonds de trésorerie mutualisés
Le législateur a redéfini et assoupli les contours de l’exception au monopole bancaire, permettant aux associations, entre autres, de se prêter de l’argent entre elles. Certains acteurs, et notamment des fédérations culturelles, ont par ailleurs initié des expérimentations avant ces lois. La loi du 15 avril 20241 apporte deux changements majeurs pour améliorer les relations financières entre associations.
Premièrement, elle assouplit considérablement les conditions de prêt entre associations fixées dans la loi du 1er juillet 20212. Le périmètre des organismes prêteurs s’étend désormais à tout organisme sans but lucratif, au-delà des seules associations loi 1901 (fondations, etc.). Les anciennes restrictions sont supprimées : il n’y a plus d’exigence d’existence minimale de trois ans pour l’association prêteuse, ni de limitation sur la durée du prêt ou le taux d’intérêt. En contrepartie, le prêt doit être approuvé par l’organe de direction. La liste, les conditions et le montant des prêts consentis sont mentionnés dans le rapport de gestion ou d’activité de l’organisme prêteur.
Deuxièmement, la loi facilite les flux de trésorerie en introduisant la possibilité de conclure une convention de trésorerie entre associations membres d’un même groupement ou ayant des relations financières régulières. Cette disposition vise à sécuriser juridiquement une pratique existante qui suscitait des interrogations dans le secteur associatif.
L’ensemble de ces mesures a pour objectif de renforcer la stabilité financière des associations en leur donnant plus de flexibilité dans leur gestion de trésorerie.
En premier lieu, nous avons défini, avec notre gouvernance, le principe de fonctionnement et le périmètre du fonds de trésorerie. Pour ce faire, nous avons été accompagnés par un organisme de conseil et de formation dans l’économie sociale et solidaire (ESS) qui nous a aidés à élaborer le montage du projet : le RIM serait à la fois chargé de collecter l’épargne dormante via des apports avec droit de reprise et organisme prêteur à des associations adhérentes via des conventions de prêt.
Ensuite, nous avons procédé à une évaluation des besoins de trésorerie et fait l’inventaire des ressources potentiellement disponibles. Nous avons conclu que les besoins représentaient environ 4 % de l’épargne dormante. Un autre enjeu majeur a été d’expliquer clairement le projet aux membres et de rassurer les potentiels « apporteurs » sur la gestion de leur trésorerie par le réseau. Cette phase d’acculturation et de débat avec les structures adhérentes, visant à établir la confiance et susciter l’adhésion, s’est révélée être la plus longue.
Nous avons finalement réussi à convaincre 12 adhérents contributeurs. En complément, nous avons décidé de mettre en place un contrat d’apport associatif avec droit de reprise qui permet de renforcer les fonds propres du RIM et sert de « caisse de transition » si un apporteur se retire. Il représente également le seuil d’encours de crédit que le RIM ne doit pas dépasser.
Nous avons également sécurisé le montage juridique et fiscal du projet. Pour ce faire, nous avons consulté le service juridique du Syndicat des musiques actuelles (SMA), notre commissaire aux comptes et des avocats. Nous avons alors décidé de nous appuyer sur le 1 de l’article L. 511-6 du code monétaire et financier.
Enfin, nous avons intégré, dans les statuts du RIM, notre nouvelle activité de prêt à titre occasionnel, défini les conditions de prêt, créé une gouvernance dédiée et fixé les règles de son fonctionnement au travers d’une charte (confidentialité, devoir de réserve, motivation de la prise de décision, etc.). Le comité d’engagement est composé de six membres ayant une expertise sectorielle et/ou financière (France Active Nouvelle-Aquitaine, expert-comptable, responsables administratifs et financiers du RIM et de structures adhérentes, etc.).
L’association prêteuse doit minutieusement évaluer la situation financière de l’emprunteur et sa capacité de remboursement en examinant ses états financiers, ses prévisionnels et ses relations avec ses différents partenaires. À cet égard, nous avons mis en place un diagnostic économique et financier complété d’un entretien avec chaque structure emprunteuse. Cette évaluation est cruciale pour éviter le risque de soutien abusif, qui pourrait engager notre responsabilité si l’emprunteur était déjà en difficulté lors du prêt. Nous menons, par ailleurs, des rendez-vous de suivi avec les structures ayant eu un prêt et celles qui ne l’ont pas obtenu. C’est donc également un outil de prévention et d’alerte.
L’association prêteuse doit également s’assurer que le prêt ne met pas en danger sa propre trésorerie et qu’elle conserve une capacité à faire face à ses propres besoins et imprévus. Par ailleurs, le soutien de nos partenaires publics – la région Nouvelle-Aquitaine, la direction régionale des affaires culturelles (DRAC) Nouvelle-Aquitaine et le conseil départemental de la Gironde – nous a permis de mener, dans un premier temps, une phase d’expérimentation qui a déjà fait l’objet d’une évaluation à mi-parcours, dont les résultats se sont avérés positifs.
La détection précoce des difficultés et l’accompagnement des structures sont le premier avantage : nos analyses et les passages en comité nous permettent de détecter, derrière les besoins de trésorerie, les problématiques économiques et financières que la structure n’aurait pas identifiées. Dans la phase de préparation et de suivi, nous aidons notamment les structures à construire et améliorer leur plan de trésorerie, ce qui participe à leur montée en compétences.
Le deuxième avantage est l’effet de levier : la mise en lien des structures avec France Active Nouvelle-Aquitaine est facilitée par son implication au sein de la gouvernance du fonds et l’accompagnement des structures permet de rassurer les banques, donc, potentiellement, de mobiliser d’autres financements.
Enfin, le fonds renforce le sentiment d’appartenance à un réseau, les uns bénéficiant ponctuellement de la solidarité des autres. Il est toutefois à noter que, même si cette solution est encore expérimentale au sein du réseau, sa mise en place et son suivi exigent beaucoup de temps et ne sont pas financés.
De plus, nous observons dernièrement une hausse des demandes en raison de la conjoncture actuelle qui vient percuter le modèle économique des structures et nécessite le développement de plus de ressources propres, ce qui n’est pas le rôle du fonds. Nous nous interrogeons également sur le partage du risque : actuellement, c’est le RIM qui assume l’intégralité du risque en cas de défaut de paiement, en puisant dans ses fonds propres.